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Paisani in anda pà a fiera di u Niolu. LC Canniccioni v 1910

01/07/18

Eyzahut donc

M'eru pusatu una stonda in una casa biota meza falata in tarra, ind'à sò carciara lasciata à guaru. Massimu à piattammi da i giandarmi e da u soli (chi u più beddu mumentu par un disertori, sapeti, è u cilenti). U più chi mi pisava un era tantu u gramofonu, ne mancu a me diserzioni. Nò, u più chi mi pisava era ciò chi mi trascinava in capu: prima, Marie-Hughette e doppu u... doppu da vena.
M'eru pigliatu i vistuti civili à Lejan cù u sò pacchettinu di lettari ch'eddu tiniva cun grand' primura ind'i uni stacca falsa e sfilata chi era stata cusgita, una volta, à filu rossu.
(Mi missi, tandu, à leghja incù poccu vargogna, in timiconu e curiosu.)

Eyzahut dans la Drôme, le 21 juillet 1915

Mon cher Amour,

Comment en suis-je arrivé là?
C'était hier.
D'abord j'ai entendu une voix et acheté un livre. 
Ce livre parlait d'Eyzahut, ses mots étaient étrangement rythmés. Il m'a semblé qu'il me parlaient de vous. De nous.
Mais savez-vous encore lire ?
Alors, le soleil est mort et je suis parti au régiment. Je sais que j'ai pleuré, je crois me souvenir que tu as ri, n'est-ce pas ? Ou bien était-ce le contraire? Ou bien encore rien de tout cela ?
Mes souvenirs se brouillent, j'ai laissé là-bas ma raison et me voici, ici, sur le front de l'Est, avec des hommes à mener et avec nos souvenirs dont je ne sais que faire ?
Continue et écris-moi, hier, s'il te plaît, la couleur de tes yeux, celle de ton prénom, celle de ta douce voix et surtout des émerveillements qu'elle savait porter. La couleur de ta fidélité, aussi, sans doute.

Lieutenant Ernest Lejean,
171e R.I
166e Division d'Infanterie

(A lettara era squassata ed un fù mai stata mandata culà... quant'è ch'edda mi fussi stata riservata à me, aò !)

Follon (ditagliu)