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Paisani in anda pà a fiera di u Niolu. LC Canniccioni v 1910

24/06/17

Tisgimuntò

Ce 11 novembre 1916,

Très chère Huguette,

Depuis une semaine nous connaissons un peu de répit. Le regiment stationne en entier à F.
Notre journée fut (?) consacrée à l'installation, au nettoyage des armes, des effets et matériel, au rangement des munitions. Demain nous reprenons l'instruction spécialisée (à destination des artilleurs, grenadiers, mitrailleurs, sapeurs...)

Je dois vous dire que je suis touché, abbatu, meutri (marcatu) une lettre du village m'apprend le décès, au début de ce mois, de mon cher oncle maternel.
J'aimais tout chez cet homme qui a toujours pris soin de moi. Je revois son grand rire quand, enfant il me faisait manger de la farine de châtaigne crue et puis me chatouillait (marcatu), alors je m'étouffais, car la farine est fine et bouche les poumons. Ce jeu, son jeu, est comme d'autres jeux, celui des hommes corses. Les hommes enseignent aux enfants la méfiance, l'adversité, le dépassement, l'instinct, la bataille, la vie en sorte. Plus tard, pour m'appendre à nager il me pris comme on peut prendre un chat et me jeta au milieu d'un lac. L'instinct de survie fit le reste et c'est ainsi que j'appris à nager. Plus tard, il m'appris les armes, celles de la terre et celles de la poudre, et comment m'en servir. Sa mère, ma grand-mère, m'avait elle enseigné contre qui les porter.

Il était en 70 à Strasbourg, il connut la défaite. Heureusement, nous, enfants, neveux, petit enfants, nous étions devenus sa nouvelle victoire. Je lui dois beaucoup, vraiment, voyez-vous.

(...)