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Paisani in anda pà a fiera di u Niolu. LC Canniccioni v 1910

14/06/17

Train (1)

Cher Sarratu,

C'est ce matin en rentrant à la maison que j'ai découvert votre courrier m'apprenant que vous êtes en bonne forme.
Savez vous que je vous ai attendu deux jours durant à la gare, guettant chaque train venu du front du nord, jalouse de certaines étreintes et surtout triste, très triste et inquiète de voir tant de visages défaits, et inquiète, très inquiète de ne pas vous compter parmi eux ? Je vous avais apporté un portrait de moi que Mme D du B a crayonné avant-hier au soir. 
Je m'enerve, je me dis que vous êtes un méchant homme.
Je ne sais si c'est votre courage ou votre lâcheté qui vous ont dicté votre choix de ne pas monter dans ce train, mais le résultat est là.
Je vais maintenant, si vous me le permettez, me reposer et reprendre mes esprits.

Une fois rentrée à la maison, tante n'a rien dit.

Vous me peinez et me déshonorez à la fois. Comment lui expliquer, en effet, que cela fait deux jours que je garde d'hypothétiques trains débarquant des fantômes de guerriers et que justement, le mien de guerrier, a choisi lui notre défaite ?
Je suis abattue.
Je ne sais plus si je dois dire : "votre Huguette" ?
J'ai l'impression que j'ai tout dėsappris.
Je suis triste, fatiguée.




A Renoir (ditagliu)